Création « Dans les marécages et sur la terre »

Voix 1 :
La grue danse maintenant.

La grue danse à présent.
Le marécage a pris un sens nouveau, une dignité cachée.
Le marécage, resté là tout l’hiver à savoir cela.

Voix 2 :
Ce sont des choses que nous aimons entendre -

un coeur solitaire et sauvage

qui dans sa liberté sans limites
cherche encore
à s´approcher de nous, ceux d´en bas.
Voir cela une fois, puis plus jamais.

Voix 1 :
La grue danse.
Voir cela une fois, puis plus jamais.

Voix 2 :
Voir cela pour toujours.

Eau, fleuve, marécage.
Oiseau.

Ce peu d’eau et de terre, mêlées, a la charge vibratoire d’un Haïku , d’une révélation. Au cœur du marécage, lieu de pourrissement et de germination, une danse de grues, oiseaux du renouvellement, de la longévité et de la régénération cyclique. Ce qui advient dans ce marécage, tôt le matin dans le gel et la fièvre d’un sang qui bat, est inouï, de l’ordre du surréel.

A propos de Dans les marécages et sur la terre, comment dire la fascination qu’exerce ce texte qui relève du rêve profond, du rêve initiatique, où sourd l’obsession du regard, de cet organe des sens qui peut rester à la surface des choses, ou descendre au-delà du vu. L’immersion dans le marécage devient la métaphore d’une descente en soi-même.

Dans le temps suspendu, un interminable échange de regards entre l’homme et l’animal. Ces yeux regardent d’autres yeux pour finir par ne former qu’un seul et unique regard. On est proche de l’expérience chamanique, d’une communication avec l’esprit de la nature.



Tout dans l’univers de Vesaas prend le contre-pied du spectacle, de l’efficacité, du faste et du somptueux. On y parle peu, les paysages s’étirent, le temps s’abolit. On convoque l’invisible sans toutefois créer des images visibles de l’invisible. Laissons l’invisible rester invisible. Il y est partout question de regard, qui se multiplie dans le marais, à la mesure des minuscules et innombrables flaques d’eau où se reflètent le ciel et la danse des oiseaux migrateurs. Regards croisés, face à face avec la danse ailée du farouche oiseau sauvage. Le jamais vu est à portée de pupille. L’œil perçoit, sans le moindre intermédiaire, l’espace d’un éclair…



Spectacle de clôture d’une résidence de 6 mois et demi en 2016 de la compagnie au sein du musée Départemental Arles Antique – Tout public, à l’Auditorium du Musée Départemental Arles Antique /Deux représentations à 16h et 21h- durée 1h20 / Mise en scène : Michel Tallaron – Jeu : Nil Jourdy, Marianne Salmon, Michel Tallaron – Musique : Lemny Scate – Création Vidéo : Olivier Bignon – Crédit Photos : Mathilde Lou / Troisième Rêve Théâtre